Non, l'IA ne volera pas vos emplois
Eric Martel
22 mai 2019
Carrière, Actualités, IA
4 minutes à lire
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Non, cette fameuse apocalypse de l’emploi que l’on imagine, causée par l’intelligence artificielle (IA), ne risque de pas survenir!
C’est du moins la conclusion avancée par le professeur de l’Université de Washington Pedro Domingos dans le cadre du panel Attitudes Adaptives présenté au C2 Montréal.
Celui-ci a été interrogé en long et en large par Tom Standage, journaliste de The Guardian, sur l’avenir du marché de l’emploi dans le contexte du développement de l’intelligence artificielle.
« On repensera à cette notion d’apocalypse de l’emploi et on se demandera : à quoi on pensait! », lance-t-il devant des centaines de participants amassés dans la salle Forum Solotech.
La même peur à chaque décennie
Aux yeux du spécialiste en intelligence machine, l’idée selon laquelle l’avènement des robots rime avec une diminution du nombre d’emplois offerts est préconçue.
Il enchaîne en expliquant que ce type de réflexion frappe le marché de l’emploi à chaque décennie, et ce, depuis des centaines d’années. Rappelant que les gouvernements prennent des initiatives afin de créer des emplois, il assure que l’économie saura s’adapter à la nouvelle réalité de l’intelligence artificielle.
« Rappelez-vous qu’il y a deux cents ans, 98 % des gens étaient fermiers. Les choses changent vite. Il y aura de nouveaux emplois », analyse-t-il.
Mais l’animateur lui rappelle que cette fois-ci, la situation est potentiellement différente, puisque l’IA remplace certaines capacités cérébrales de l’humain. Le professeur Domingos rétorque à cette affirmation en assurant que nous sommes loin du jour où l’intelligence humaine pourra être remplacée par celle des robots.
« L’intelligence semble un concept beaucoup plus simple qu’elle ne l’est vraiment. C’est une erreur de croire que les robots sont plus efficaces que les humains. Il y a certaines tâches qu’ils accomplissent mieux, mais c’est rare », admet-il.
Il prouve son point en se référant à certains tests effectués par des entreprises en IA. Elles soumettent une panoplie de photos d’automobiles à un système informatique, afin qu’il puisse les identifier automatiquement.
Mais comme l’enseignant le décrit, il arrive encore aujourd’hui que ces systèmes ne parviennent pas à faire la distinction entre une autruche et une voiture.
« On a réussi à parcourir des milliers de milles en IA, mais il reste encore des millions de milles à faire pour égaler l’intelligence humaine. C’est un chemin qui ne sera pas parcouru avant des décennies. »
Besoin des robots?
Cette effervescence de l’IA ne représente aucun danger, selon Pedro Domingos. Au contraire, il affirme que dans l’optique où la population est vieillissante, l’implantation de robots dans l’immédiat au sein de notre société est essentielle.
« Le danger n’est pas que l’IA se développe trop rapidement : c’est qu’elle se développe trop lentement. On a besoin des robots, » s’exclame le panéliste.
Dans la situation actuelle, le chercheur estime que l’humain apprend encore à un rythme qui dépasse celui de n’importe quelle machine.
Il fait référence à AlphaGo, un programme informatique capable de jouer au go qui avait réussi à vaincre un joueur professionnel. Plusieurs avaient perçu cette victoire comme une marque du fait que l’IA dépassait tranquillement les capacités d’apprentissages de l’humain.
Pedro Domingos préfère en rire, rappelant que la machine avait participé à des milliers de plus de parties que n’importe quel autre être humain.
« L’apprentissage machine n’est pas très bonne pour extraire le savoir des données. Mais ça, les gens le font à merveille », dit-il en souriant.
La Chine, au sommet?
L’animateur du panel a souhaité déboulonner un autre mythe : l’hypothèse selon laquelle l’essor de l’apprentissage machine favorise la Chine. En effet, il explique entendre souvent que les pays d’Asie ainsi que les multinationales seront avantagées au cours des prochaines années, puisque ceux-ci détiennent énormément de données, ce qui leur confère un éternel avantage.
Il n’en est rien, selon Pedro Domingos.
« Les gens qui disent ça ne considèrent pas tous les aspects de la question. Un jour, si une entreprise trouve un algorithme capable d’extraire 100 fois plus de données que Google, il la dépassera », assure-t-il.
Il ajoute que posséder plusieurs données n’est pas nécessairement un avantage si celles-ci sont trop homogènes. Selon lui, on assume à tort qu’avoir du succès en IA est synonyme de détenir plusieurs données. C’est une erreur, puisque qu’il y aura plusieurs avancées en IA au cours des prochaines années, avertit-il.
« Les avancées qui ont été faites en intelligence artificielle sont insignifiantes », image-t-il, en faisant référence aux progrès qui seront faits en la matière.
Et pour faire avancer l’IA, le professeur estime que les consommateurs ne devraient pas avoir peur de confier leurs données aux entreprises.
Il rappelle qu’il y a plusieurs années, les gens n’auraient jamais considéré confier leur argent à une institution financière. Petit à petit, ils seront moins attachés à leur vie privée, et il ne s’agira que d’un processus normal.
« Comment je peux protéger ma vie privée? C’est la mauvaise question à se poser. La question devrait être plutôt: comment je peux maximiser l’utilisation des donnés pour mon bénéfice? »
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