Rêver en couleurs fait partie du quotidien de Marie-Chantal Milette. Littéralement.
Sauf que contrairement à d’autres rêveurs, la fondatrice de l’agence créative Kryptonie réalise présentement son ambition, qui aura fait hausser bien des sourcils: elle est la seule experte en couleurs au Québec.
Haute comme trois pommes, elle disait à qui voulait l’entendre qu’elle voulait travailler dans le domaine des couleurs. Aujourd’hui, elle est consultante et conçoit des campagnes marketing pour des entreprises comme Bâton Rouge et le Spa Finlandais.
« On prend plus de 35 000 décisions par jour. Et la première de celle-là, c’est de choisir ce qu’on va porter. Un choix de couleur, c’est l’expression de ce que l’on souhaite véhiculer. C’est ce que je cherche à comprendre », raconte-t-elle à Espresso-jobs, dans le lounge média de C2 Montréal.
Créer son emploi

Il n’existe pas de programme d’études en couleurs. Pas d’ordre professionnel. Pas de postes au sein d’entreprises. C’est le problème qu’envisageaient ses parents, lorsque Marie-Chantal Milette abordait ses intentions.
Travaillant en finance et en comptabilité, ils ne croyaient pas qu’être consultante en couleurs constituaient un réel métier. Ils lui ont donc suggéré de se diriger vers le Collège Salette, où elle a étudié en design graphique.
Mais une fois là-bas, l’étudiante était toujours persuadée du contraire. Sous les conseils d’un analyste marketing, elle a donc plié bagages vers l’école en arts The Creative Circus, à Atlanta, aux États-Unis.
Dans son programme, elle suivait un cours en couleurs, qu’elle considère pivot dans l’industrie.
« Là-bas, ils t'emmènent au bout du rouleau. Chaque fin de session, je devais présenter des projets devant des jurés. Si je n’étais pas capable de le faire, je coulais. Disons que j’ai pleuré plusieurs fois! », se remémore-t-elle, avec un sourire en coin.
Malgré ces difficultés, la Montréalaise a quitté les États-Unis avec un diplôme en poche. Un exploit dont elle est particulièrement fière, compte tenu du taux de passage de seulement 30% de son école.
« C’est plus bas qu’en médecine… alors je dis souvent en riant que je suis la docteure des couleurs! »
Et pour mériter ce titre fictif, Marie-Chantal Milette ne s’est pas assise sur ses lauriers.
Après ses études, elle a lu toutes les études et les livres qu’elle pouvait trouver sur les couleurs. Elle a aussi approché son idole, Leatrice Eiseman, directrice de Pantone Color. À ses côtés, elle a appris les rouages de la prédiction des tendances couleurs…
La Nostradamus des couleurs
Chaque année, Pantone détermine une couleur marquante.
En 2013, alors qu’elle venait de fonder l’agence créative Kryptonie, Marie-Chantal Milette était bien au courant de ce fait. Elle savait que si elle parvenait à prédire la couleur de l’année, elle gagnerait une notoriété importante.
« Je savais que prédire la couleur de l’année causerait un bon impact au niveau de la clientèle », explique-t-elle.
Elle passe donc tous les facteurs pouvant affecter le choix de la couleur de l’année au peigne fin: les analyses du comportement des consommateurs, l’influence des médias de masse, les dernières tendances dans le secteur automobile, les derniers gagnants du Superbowl… rien de lui échappe.
« On sortait d’une récession, alors les gens voulaient voir une couleur un peu plus joyeuse », analyse-t-elle.
Elle détermine donc que la couleur en question est le radiant orchid, un type de mauve avec des teintes de rose.

Elle envoie donc sa prédiction à divers médias, qui ne la prennent pas au sérieux… jusqu’au jour où sa prédiction est confirmée.
« J’ai fait mes premières apparitions médiatiques. C’est vraiment grâce à cela que je suis devenue populaire...ça m’a donné un gros boom! »
Du chemin à faire
Aujourd’hui, en observant le travail des firmes marketing en termes de choix de couleurs, Marie-Chantal Milette qu’il y a beaucoup de décisions qui semblent prises de manière aléatoire.
« Dans les agences, on écoute trop le client. Il y a un gros travail d’éducation à faire de ce côté-là. »
Et ce travail-là, l’experte ne se gêne pas à le faire.
Si l’un de ses clients critique ses propositions de couleurs, elle rétorque sans gêne: « Je m’en fous! »
« Je leur dis d’oublier ce qu’ils pensent, de se mettre dans les souliers des clients. Le but reste de leur plaire pour augmenter son chiffre d’affaires! »
Justement, au cours des prochaines années, « la docteure des couleurs » veut influencer le plus grand nombre de personnes, en donnant des conférences et des formations afin de partager ses connaissances.
« Je pense que ce n’est pas assez fait. Ce n’est pas le seul facteur en marketing, mais ça fait partie d’un tout. Quand mes clients ont des sucess stories, c’est comme un standing ovation pour moi. J’espère pouvoir participer aux succès du plus grand nombre d’entrepreneurs. »